Le lait et la viande seront les plus grands pollueurs d’ici 2050

La croissance des grandes entreprises de production laitière et de viande est incompatible avec les objectifs de l’Accord de Paris sur le climat, met en garde une nouvelle étude.

La consommation de viande et de produits laitiers pèse lourd dans les émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial. Et la tendance pourrait encore s’accentuer, prévient un nouveau rapport réalisé par l’Institut pour l’Agriculture et la politique commerciale ainsi que  l’ONG GRAIN.

Publiée le mercredi 18 juillet, ce  nouveau rapport sur les émissions de gaz à effet de serre (GES) du secteur de la viande et des produits laitiers à l’horizon 2050 met en évidence la place croissante de ces produits dans les émissions mondiales.

Aujourd’hui, les émissions de GES des cinq premières entreprises du secteur de la viande et des produits laitiers –  JBS (Brésil), Dairy Farmers of America, Tyson et Cargill  (États-Unis) et Fonterra ( Nouvelle-Zélande) – sont déjà supérieures à celles des géants des énergies fossiles, comme Exxon, BP ou Shell, souligne le rapport.

Et le top 20 des producteurs de viande et produits laitiers dans le monde pèsent ensemble davantage que les émissions totales de pays tels que l’Allemagne ou le Royaume-Uni.

Croissance effrénée

Mais si la croissance du secteur de la viande et des produits laitiers se poursuit au rythme actuellement prévu par les géants du secteur, ce dernier pourrait représenter d’ici à 2050 plus de 80% du « budget » annuel d’émissions de gaz à effet de serre compatible avec l’objectif de l’Accord de Paris pour le climat.

La trajectoire des émissions de gaz à effet de serre des deux secteurs pourrait rapidement rendre inatteignable l’objectif de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C. En effet, seulement la moitié des 35 poids lourds du secteur ont mis sur pied des plans de réduction de leurs émissions.

Le géant brésilien JBS a ainsi tablé sur une hausse de 30% de la consommation de viande par personne d’ici à 2030 dans ses perspectives de développement. L’entreprises anticipe ainsi une consommation moyenne de 48 kilogrammes par an en 2030, contre 37 en 1999.

Cette stratégie présentée au investisseurs en 2014 va à l’encontre des objectifs climatiques, dénoncent les auteurs du rapport. En effet, selon un rapport de Greenpeace, la consommation de viande devrait reculer à 22 kilogrammes par an et par personne en 2030, puis à 16 kilogrammes d’ici 2050 pour limiter réellement les effets du changement climatique.

Estimation des émissions

Pour les auteurs du rapport, les grandes entreprises visées par l’étude ont également échoué à évaluer leurs émissions de manière correcte, puisque la majorité d’entre elles excluent de leur études sur leur empreinte carbone leur chaîne d’approvisionnement, qui pèse pourtant entre 80 et 90% des émissions réelles du secteur.

« L’élevage industriel et les secteurs laitiers contribuent grandement au changement climatique, mais ils ont jusqu’à présent échappé à tout contrôle, car ils ne collectent aucune donnée sur leur impact ou parce qu’ils ne prennent pas d’actions crédibles sur la base de ce qu’ils savent » a déclaré Oliver De Schutter, ancien rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à l’alimentation (2008-2014), co-président du groupe international d’experts sur les systèmes alimentaires durables.

«Ce rapport devrait encourager les gouvernements à agir pour bloquer leur expansion », a-t-il ajouté.

Responsabilité

Si la responsabilité de la production et consommation de viande et de produits laitiers dans le réchauffement climatique est régulièrement pointée du doigt, le politique peine à établir des objectifs concrets, comme pour les secteurs de l’énergie ou des transports.

L’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) estime que l’industrie de l’élevage est pourtant responsable de 14,5 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Et les prévisions indiquent par ailleurs que la consommation mondiale de viande augmentera de 76 % d’ici à 2050, sous le coup de l’évolution vers un régime plus carné dans les pays en développement.

Selon l’Agence européenne pour l’environnement (AEE), la consommation de viande et de produits laitiers représente près d’un quart de l’impact environnemental de la consommation totale de biens et services dans l’UE à 27.

Dans le monde, près d’un tiers des terres cultivées dans le monde est utilisé pour l’alimentation animale. Rien que dans l’UE, 45 % de la production de blé est utilisée pour nourrir les animaux.

Source : euractiv.fr