Non, l’argent liquide ne va pas être interdit en France

74.000 personnes ont signé une pétition selon laquelle le FMI et Visa veulent faire disparaître le cash…

  • Le FMI et le Visa œuvreraient à faire disparaître l’argent liquide.
  • C’est qu’affirme l’auteur d’une pétition. Celle-ci a recueilli 74.000 signatures en trois semaines.
  • Mais cette pétition mélange des éléments qui ne sont pas liés. Il n’y a pas de projet de faire disparaître totalement l’argent liquide en France.

« Non à l’interdiction de l’argent liquide ! » Le titre de cette pétition, qui a recueilli 74.000 signatures depuis sa mise en ligne le 25 octobre, a le mérite d’être clair. Mais quelle est cette menace qui plane sur nos bas de laine ?

Selon l’animateur du blog Le Vaillant Petit Economiste, qui a lancé la pétition, la menace serait double : elle viendrait à la fois du FMI et de la société Visa. Le FMI aurait recommandé que « la fin des paiements en liquide vienne du secteur privé et non du secteur public. » Selon le blogueur, ce rapport de l’organisme « fait peser un soupçon inacceptable sur l’agenda des grands organes politiques mondiaux. »

Quant à Visa, le blogueur les accuse d’interdire aux commerçants l’usage de l’argent liquide « contre des rabais sur l’équipement de nouvelles technologies de paiement. » Pour soutenir cette affirmation, le Vaillant Petit Economiste cite Alfred Kelly, directeur général de Visa, qui a déclaré : « Notre objectif est de supprimer l’argent liquide. »

Le blogueur rappelle que les pièces et billets ont « cours légal en France. »

FAKE OFF

Faut-il s’alarmer de toutes ces citations ? Le FMI et Visa pousseraient-ils à la fin du bon vieux cash ? La réalité est bien plus nuancée.

Le rapport du FMI n’est en tout bonnement pas un : il s’agit d’un « document de travail », qui décrit « une recherche en cours par l’auteur ». Ce document « n’a pour but de se prononcer en faveur ou contre la démonétisation » et il ne représente pas « nécessairement le point de vue du FMI. » Ce document de travail réunit des arguments en faveur et contre l’abandon de l’argent liquide.

Quid des projets de Visa ? Faut-il s’en inquiéter ? Alfred Kelly a bien déclaré en juin devant des investisseurs que Visa « concentre ses efforts pour rendre l’argent liquide caduc ». Une déclaration qui ne visait pas particulièrement la France, mais faisait allusion à la stratégie globale de son entreprise.

Cette phrase est peu surprenante de la part d’une entreprise qui tire son existence de la commercialisation de solutions de paiement dématérialisées… « Pour Visa, ce sont les consommateurs qui décident quel moyen de paiement ils veulent utiliser, explique une représentante de la société à 20 Minutes. C’est la raison pour laquelle nous pensons qu’il est nécessaire qu’ils aient toujours de multiples options de paiement. »

Un concours pour moins de cash

Dans la pétition, le directeur général est accusé de vouloir « interdire aux commerçants l’usage de l’argent liquide contre des rabais sur l’équipement de nouvelles technologies de paiement », une allusion au « Visa cashless challenge ».

Ce concours a pour but de distribuer jusqu’à 500.000 dollars (424.000 euros) à 50 petits commerces spécialisés dans la restauration, si ces commerçants acceptent d’abandonner le liquide. Ce « challenge » ne concerne que les entreprises américaines. « Il n’est pas prévu de lancer cette initiative en France », précise la représentante de Visa.

« En situation de quasi-monopole », vraiment ?

Selon l’auteur de cette pétition, la multinationale américaine « émet les 2/3 des cartes de paiement en circulation en France. » Celui dénonce une « situation de quasi-monopole. »

Des chiffres que l’entreprise refuse de confirmer : « Visa est une entreprise cotée à la Bourse de New York, New York Stock Exchange (NYSE). Dans ce cadre, elle est soumise aux règles de la SEC (US Security and Exchange Commission) et ne peut pas communiquer d’informations sur sa part de marché. »

43,5 millions de cartes Visa en France

Selon les dernières données disponibles, reprises sur le site cbanque, il y avait 43,5 millions de cartes Visa en circulation en France en 2014, sur 70 millions. Cela représente 62 % du marché, un peu moins que les deux tiers.

Prudence, donc, face à cette pétition, qui mélange un document de travail et des données sur Visa qui n’ont aucun lien. Il est donc encore possible de régler sa baguette avec des euros sonnants et trébuchants (ou un billet, si vraiment vous n’avez pas de monnaie).

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Source : 20minutes.fr